Méditation biblique. Entente des églises chrétiennes.
Croix de mission. Lundi de Pâques 1er Avril 2024
Luc Bussière
L’année passée…
Nous nous étions retrouvés l’année passée sur le même lieu de la croix de mission et c’est Roland Kauffmann qui avait apporté la méditation. Qui s’en souvient ? Il était question des 4 églises qui formaient l’entente à l’époque, autant de couleurs pour manifester une même foi, un même témoignage, comme il y a 4 évangiles qui racontent la même histoire de Jésus, mais avec des couleurs et des accents différents. Les Écritures ont toutes été inspirées de Dieu, elles transmettent toutes une même histoire, mais cette grande histoire a été écrite par des hommes et des femmes si différents, des rois, des bergers, des chefs d’entreprise, à des époques et des contextes très différents. Si le canon des Ecritures est définitivement clos, l’histoire de Dieu continue de s’écrire, avec des églises différentes, des gens différents, vous et moi. Unité et diversité. Une unité qui n’est pas l’uniformité, mais qui accueille et célèbre la différence, avec une foi qui nous rassemble : la foi au Christ mort et ressuscité, vivant aujourd’hui, créateur, rédempteur, Seigneur des Seigneur, Alpha et Oméga, Celui qui est le chemin, la vérité et la vie, Celui qui nous aime.
Ressuscités ENSEMBLE
Nous étions censés nous retrouver aujourd’hui à la croix de mission, cette position élevée qui domine Guebwiller, le Lundi de Pâques, pour célébrer la résurrection de Jésus. Mais spirituellement, nous nous trouvons dans cette position élevée. En effet, cette résurrection est également signe notre propre résurrection, en Lui, qui sera pleinement manifestée à son retour. L’Épître aux Éphésiens ( 2. 6-7) souligne cette vérité : « il nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes, en Jésus-Christ, afin de montrer dans les siècles à venir l’infinie richesse de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus-Christ. »
La première Pâque, la sortie d’Égypte, parlait de la mort vaincue et de la délivrance pour tout un peuple : le peuple d’Israël. Un peuple d’esclaves est sorti de la servitude pour rentrer dans son héritage, et commencer à accomplir sa vocation d’être une lumière pour toutes les nations. L’autre Pâques, où Jésus est mort et ressuscité, prolongement de la première Pâque, nous parle aussi d’un nouveau peuple, composé de juifs et Gentils qui ont reconnu en Jésus le Messie. Ce nouveau peuple, l’épouse du Fils, est né du côté percé de Jésus. Le bénéfice de la résurrection n’est pas seulement pour des individus, mais pour un peuple tout entier : le peuple de Dieu ! La vie du ressuscité est présente en chacun de ses enfants ! Il n’est pas étonnant que lorsqu’ils se rassemblent, il y a de l’amitié, de l’affection, la vie, de la joie !
Notre rassemblement du Corps de Christ sur les hauteurs de Guebwiller nous rappelle notre véritable place : nous sommes « assis ensemble dans les lieux célestes, en Jésus Christ ». Cela nous parle de l’unité, mais aussi de l’autorité. Il n’y a pas d’autorité sans unité. « Si une maison est divisée contre elle-même, cette maison ne peut subsister » a dit Jésus. (Mt 3.25). Le Père, le Fils et l’Esprit composent la première famille, parfaitement unie, source de toute autorité.
En place d’autorité
Cette position élevée, « assis avec Christ », nous parle donc d’autorité spirituelle. Il n’est bien sûr pas question d’écraser, de dominer, ou de manipuler, mais de manifester l’amour et la grâce de Dieu : « il nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes, en Jésus-Christ afin de montrer dans les siècles à venir l’infinie richesse de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus-Christ. »
C’est une autorité que l’on manifeste aussi dans la prière ensemble. Mt 18.20 « Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux. » Lorsqu’on priera le Notre Père, on proclamera avec foi « que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel … »
C’est une autorité pour manifester l’infinie richesse de sa grâce. Si nous avons été sauvés par grâce, cela entraîne cette responsabilité de manifester cette grâce. Si nous sommes au bénéfice de sa bonté c’est pour la manifester à notre tour.
C’est une autorité pour rechercher le bien de la ville « Recherchez le bien de la ville où je vous ai menés en captivité, et priez l’Éternel en sa faveur, parce que votre bonheur dépend du sien » (Jérémie 29.7).
Rappelons-nous que Jésus a laissé un temps la gloire du ciel, et s’est dépouillé, prenant la forme d’un serviteur, devenant semblable aux hommes, et obéissant jusqu’à la mort (Philippiens 2.9-11 « C’est pourquoi aussi Dieu l’a souverainement élevé, et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père. ») C’est parce qu’il s’est abaissé que Dieu l’a élevé en autorité au-dessus de tout. De même l’Eglise est appelée à s’abaisser, dans le service, l’accueil des plus démunis, l’attention aux plus petits : c’est ainsi qu’elle sera élevée, qu’elle sera « vue » et reconnue.
Manifester sa grâce !
Cette position assise avec Lui dans les lieux célestes, ne nous laisse pas indifférents ni inactifs. Elle nous oblige, elle nous pousse, nous envoie en mission, pour montrer sa grâce infinie par notre témoignage de vie.
Le lieu sur lequel nous devions nous trouver nous le rappelle. D’après certaines sources, ce terrain autour de la croix de Mission était jadis extrêmement aride et impropre à toute culture. Il servait uniquement de dépôt pour les pierres dont les habitants débarrassaient leurs champs. L’un deux, un nommé Kutter, appelé « Kitterlé », en raison de sa petite taille, acheta ce terrain et, grâce à un travail acharné, le transforma en une terre fertile qu’il planta de vignes. D’où le nom de ce chemin qui monte à la croix de mission. C’est en 1520 que la croix de mission fut élevée, elle domine cette parcelle réputée pour la qualité de ses vins.
La mission que Dieu nous confie en tant que chrétiens, en tant que communautés et en tant qu’Entente des Églises chrétiennes est d’ôter les pierres, de changer les déserts en jardins, les terres arides en terres fertiles. Nous sommes l’Eglise du Seigneur, nous sommes sa vigne ! Nos communautés sont comme des vins de qualité, différents, mais ayant chacun son arôme, sa saveur. Je pense au bon vin vieux que pourrait représenter l’Eglise catholique, au vin plus récent mais succulent aussi de la Réforme, au vin plus récent, mais qui complète cette palette de parfums que sont les églises évangéliques ou adventistes.
Trois témoins de Guebwiller
Nous sommes donc « ressuscités ensemble », et « assis ensemble » dans les lieux célestes, en Jésus-Christ afin de montrer dans les siècles à venir l’infinie richesse de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus-Christ. »J’aimerai illustrer cela par une brève présentation de trois témoins de Guebwiller qui ont manifesté cette grâce, et qui nous entourent aujourd’hui encore, faisant partie de cette « nuée de témoins » dont parle l’Épître aux Hébreux (Hébreux 12.1-2)
- Henri JAQUET (1788- 1867) est un pasteur suisse, qui fut consacré à Bâle, en 1813 avant d’être nommé pasteur allemand à Guebwiller. Il a ensuite desservi la paroisse de Glay dans le Pays de Montbéliard. Inspiré par une œuvre semblable à Bâle, il décide d’ouvrir en mai 1822 une école normale de formation d’instituteurs, l’Institut « Glay », qui a formé de nombreux instituteurs évangélistes et missionnaires dans le monde jusqu’en Afrique, en Asie, au Canada.
- Le deuxième témoin dont je veux évoquer la mémoire était jardinier à Guebwiller, André BAUER ; il entendit l’appel du Christ à le servir en mission, avec l’ordre des franciscains, et il partit pour la Chine en 1899. Il mourra martyr lors de la révolte des Boxers, ayant refusé de renier sa foi. Il a fait partie des 120 martyrs de Chine. Il a été béatifié par l’Église catholique c’est la communauté de paroisses de Guebwiller a choisi ce nom, témoin qui nous inspire aujourd’hui encore.
- Le dernier témoin dont j’ai choisi de parler est une femme, Adélaïde HAUTVALD, fille de pasteur réformé ; elle a habité Guebwiller. Elle était médecin psychiatre. En 1942, elle prit la défense d’une famille juive maltraitée par un soldat allemand. Les Allemands lui dirent alors : « Puisque vous défendez les juifs, vous partagerez leur sort ». Elle a été emprisonnée à Bourges. Les allemands lui ont porter sur la poitrine une étoile jeune avec une banderole « amie des juifs ». Elle a été déportée à Auschwitz et, au milieu de la barbarie, a su rester profondément humaine ; elle a sauvé de nombreuses vies mais est revenue profondément marquée par tout ce qu’elle a subi.
Rappelons-nous l’épître aux Philippiens qui nous rappelle l’importance et le privilège que nous avons de « Connaître Christ, et la puissance de sa résurrection ». Mais il rajoute « … et la communion de ses souffrances ». Les deux ne sont pas incompatibles.
Pour finir…
Connaître Christ et la puissance de sa résurrection ne signifie donc pas échapper au monde, mais recevoir une mission pour le monde sur la base de la seigneurie de Jésus sur toute la terre. L’Evangile affirme que Jésus crucifié et ressuscité est le Seigneur du monde, que sa mort et sa résurrection n’ont pas été seulement un événement particulier exceptionnel dans l’histoire. Elles inaugurent une transformation du monde, un monde nouveau qui a commencé à la résurrection de Jésus, continue dans nos cœurs et nos vies pour s’étendre à toute la création. Dieu a tant aimé le « monde » qu’il a donné son Fils unique… le monde est le « cosmos », la création tout entière ! A notre tour, nous sommes appelés à participer à ce travail de transformation que Jésus achèvera pleinement à son retour. C’est le sens de notre engagement en tant que chrétiens, en tant qu’Entente des Eglises chrétiennes de Guebwiller.